Une histoire née dans les ruines de la guerre, nourrie par l’ingéniosité et le sens du commerce.
Adolphe Leroy, ce nom ne vous dit peut-être rien au premier abord. Pourtant, c’est à lui — et à sa femme Rose Merlin — que l’on doit la naissance d’un géant du bricolage : Leroy Merlin.
Un parcours fascinant, celui d’un homme du nord qui, avec bon sens et courage, a transformé une idée simple en une aventure industrielle devenue mythique.
Qui était Adolphe Leroy ?
Adolphe Leroy voit le jour le 17 février 1901 à Billy-Berclau, un village du Pas-de-Calais. Le Nord de la France, à cette époque, c’est la terre du charbon, des mines, du travail manuel.
Un environnement dur, mais où les valeurs de solidarité et de débrouillardise forgent les caractères. C’est dans ce décor qu’Adolphe apprend très tôt à se retrousser les manches.
En 1921, à seulement 20 ans, il se lance dans une petite entreprise familiale : la revente de surplus américains. La Première Guerre mondiale vient de s’achever, et les stocks de matériel militaire abondent : tentes, outils, planches, vis, équipements. Adolphe y voit une opportunité incroyable.
Avec un flair commercial évident, il décide de revendre ces articles à des habitants qui reconstruisent leurs maisons. C’est ainsi qu’apparaît un petit magasin baptisé « Au Stock Américain ».
Ce n’était pas un projet glamour. Mais c’était ingénieux : proposer du matériel solide et pas cher à ceux qui voulaient réparer ou rebâtir leur quotidien.
Un acte simple, mais visionnaire : démocratiser la reconstruction. Et si vous y pensez, c’est déjà la philosophie du bricolage moderne : permettre à chacun de construire par soi-même.
Quelles sont ses origines et comment ont-elles influencé son parcours ?
Adolphe Leroy vient d’un milieu modeste. Il n’était pas fils d’industriel ni diplômé d’une grande école. Son intelligence, il la tirait du terrain, des marchés, des discussions avec les clients.
Il savait observer, écouter et sentir ce dont les gens avaient besoin. C’est souvent là que naissent les meilleures idées : dans la réalité, pas dans un bureau.
Les années 1920, dans le nord, sont celles de la reconstruction après les ravages de la guerre. Les villes sont en partie détruites, les familles manquent de tout, mais l’énergie est là. Les habitants veulent rebâtir vite et bien.
Et Adolphe leur apporte une solution : du matériel abordable, prêt à l’emploi, souvent récupéré, mais toujours utile. Il vend ce que les autres délaissent ; il voit de la valeur dans ce que d’autres appellent “vieux stock”.
Ce sens pratique lui vient aussi de son environnement. Billy-Berclau, ce n’est pas Paris : ici, on ne jette rien, on répare, on réutilise. Adolphe Leroy n’était pas un spéculateur ; c’était un commerçant de proximité, un peu bricoleur lui-même. Et c’est probablement ce lien avec le concret qui donnera à son entreprise, un ADN si fort.
Quelle est la relation entre Adolphe Leroy et Rose Merlin ?
Comme souvent dans les belles histoires, il y a une rencontre. Celle d’Adolphe avec Rose Merlin, une jeune femme née en 1898, issue, elle aussi, du nord et dotée d’un solide esprit entrepreneurial. Ils se marient, mais surtout, ils s’associent. Et ensemble, ils vont donner naissance à ce qui deviendra un empire.
En 1923, ils fondent officiellement leur société : le couple Leroy-Merlin est né. Leur union n’est pas seulement amoureuse : elle est complémentaire. Adolphe a l’instinct commercial, Rose a le sens de l’organisation. Il imagine, elle structure.
Leur duo incarne une modernité rare pour l’époque : une femme codirigeant une entreprise à part égale, dans les années 1920, c’est révolutionnaire. Rose Merlin n’était pas “l’épouse de” : elle était la co-créatrice, la tête froide du binôme.
Leur magasin grandit, d’abord localement, puis dans tout le nord de la France. Le concept du “stock américain” s’élargit à des produits de la maison, du jardin, de la construction. Petit à petit, l’entreprise prend forme. Le nom « Leroy Merlin » finit par s’imposer comme une marque unique, symbole d’un couple visionnaire.
Adolphe Leroy avait-il des enfants ? Comment s’est faite la transmission ?
Oui, le couple Leroy-Merlin a eu des enfants, et la transmission familiale a été décisive dans la continuité de l’entreprise. Dans les années 1950, leurs fils reprennent la direction du commerce. Les temps changent : l’après-Seconde Guerre mondiale annonce une période d’expansion économique.
Les Français consomment, rénovent, modernisent leurs foyers. C’est le début de la grande distribution, et les Leroy l’ont bien compris. Les enfants d’Adolphe Leroy poursuivent donc l’œuvre de leurs parents avec la même philosophie : proximité, accessibilité, modernité.
Ils innovent en introduisant le libre-service, un concept inédit pour le bricolage à l’époque. On peut enfin choisir soi-même ses vis, ses clous, ses outils : c’est simple, efficace, révolutionnaire. Ce modèle deviendra la norme et fera de Leroy Merlin un pionnier.
L’entreprise s’agrandit, ouvre de nouveaux magasins et s’installe dans tout le pays. La graine semée par Adolphe et Rose germe au-delà de leurs espérances. Leur intuition familiale devient un modèle de gestion transmis de génération en génération.
Pourquoi cette histoire est-elle encore inspirante aujourd’hui ?
Parce qu’elle parle d’autre chose que de commerce : elle parle de résilience, de vision et d’humilité. À l’heure où l’entrepreneuriat semble réservé aux start-ups technologiques et aux levées de fonds,
Adolphe Leroy nous rappelle qu’un simple besoin bien observé peut suffire à changer le monde. Pas besoin d’un algorithme ; juste d’un peu d’audace et beaucoup de travail.
Imaginez le contexte : des stocks militaires abandonnés, des planches tordues, des caisses d’outils rouillées. La plupart auraient vu du rebut ; lui a vu du potentiel.
C’est un peu l’équivalent de quelqu’un aujourd’hui qui transforme un vieux hangar en fablab ou une friche industrielle en espace de coworking. Il a vu avant les autres que le “faire soi-même” allait devenir une culture.
En 2025, Leroy Merlin compte plus de 150 magasins en France et des centaines à l’étranger. Mais derrière ces chiffres vertigineux, il y a toujours cette idée fondatrice : aider les gens à améliorer leur quotidien, un clou et une planche à la fois. Et ça, c’est profondément humain.
Quel est l’héritage d’Adolphe Leroy aujourd’hui ?
L’héritage d’Adolphe Leroy dépasse largement les murs de ses magasins. C’est une façon de penser : celle d’un commerce utile, accessible, ancré dans la vie des gens. Son nom, désormais indissociable de celui de Rose Merlin, incarne la persévérance, la simplicité et le goût du concret.
Ce qui est fascinant, c’est que beaucoup de valeurs qu’il incarnait avant l’heure résonnent avec notre époque : économie circulaire, réutilisation, autonomie, DIY (Do It Yourself). En un sens, Adolphe Leroy était déjà un précurseur de cette génération de “makers”.
Il croyait que chacun pouvait, avec un peu d’outillage et beaucoup de volonté, bâtir quelque chose de solide. Alors, la prochaine fois que vous entrerez dans un magasin Leroy Merlin, pensez à cette histoire.
À ce jeune homme du nord qui, avec quelques caisses de surplus, une épouse visionnaire et beaucoup de travail, a ouvert la voie à des millions de bricoleurs. Adolphe Leroy n’a pas simplement vendu des outils ; il a donné à chacun le pouvoir de construire sa propre vie.
